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Le système antidopage chez les sportifs de haut niveau : interview de Chloé Trespeuch, championne de snowboard savoyarde

Par 17 mai 2024No Comments

Chloé Trespeuch, double médaillée Olympique en snowboard, nous expique comment fonctionne le système antidopage ADAMS

Pouvez-vous vous présenter ainsi que votre parcours sportif ?

Je m’appelle Chloé Trespeuch, je suis en équipe de France de snowboardcross et c’est ma 13ème année de participation à la coupe du monde. J’ai également vécu trois fois les Jeux d’hiver avec une médaille de bronze en 2014 à Sotchi et une médaille d’argent en 2022 à Pékin. Je suis en route pour me préparer à participer aux prochains JO d’hiver de 2026.

Connaissance du système antidopage :

Comment avez-vous été informée sur les contrôles antidopage et quand en avez-vous été sujet pour la première fois ?

Cela fait désormais cinq ans que je suis inscrite sur la liste ADAMS. Un courrier avec accusé de réception nous est envoyé pour nous informer de notre intégration au programme. Une formation obligatoire nous est ensuite dispensée afin de bien comprendre ce système, réputé complexe. Pendant cette formation, nous sommes informés sur les compléments alimentaires autorisés, les démarches à suivre en cas de besoin de médicaments, ainsi que toutes les réglementations en vigueur.

En ce qui concerne mon premier contrôle antidopage lors de ma première participation à la Coupe du Monde de snowboardcross, il s’est déroulé après avoir franchi la ligne d’arrivée. Nous avons le droit d’être accompagnés d’un médecin et sommes tenus de déclarer toute prise de médicaments.

Quant aux contrôles inopinés, j’ai été soumise à cinq d’entre eux au cours des cinq derniers mois.

La fréquence de ces contrôles est aléatoire, sans règles établies. Chaque jour, je dois indiquer une heure à laquelle je suis disponible pour d’éventuels contrôles.

Pensez-vous que les sportifs de Haut Niveau et les sportifs amateurs sont bien informés sur les règles antidopage ?

À mon sens, nous avons tous une connaissance approfondie des règles en matière de dopage. Il est impératif de savoir que si nous avons besoin de prendre des médicaments, nous devons être suivis et pris en charge par un médecin du sport. Les plateformes dédiées à la vérification des substances dopantes sont très bien conçues et extrêmement claires. Tous les sportifs disposent des outils nécessaires pour consulter la liste des produits considérés comme dopants.

Cependant, il est sans doute vrai que les sportifs de niveau amateur ne soient pas aussi bien informés que nous sportifs de haut niveau sur ce sujet particulier.

Le Système ADAMS :

Comment décririez-vous votre expérience avec le système ADAMS ?

Mes sentiments à ce sujet sont mitigés, car le processus est extrêmement contraignant. Nous vivons constamment dans l’appréhension de recevoir un avertissement, principalement en raison des changements fréquents dans nos plannings liés aux entraînements et aux conditions météorologiques. Cela nous oblige à consacrer un temps considérable sur l’application pour fournir des indications précises sur notre position et nos disponibilités.

De plus, la mauvaise qualité du réseau dans les montagnes nous expose à la crainte de manquer un contrôle, bien que cela ne soit en aucun cas intentionnel pour éviter les vérifications.

Malgré cette contrainte, je pense que le système ADAMS est indispensable pour garantir l’intégrité du sport et la crédibilité des compétitions.

Les impacts sur la vie quotidienne :

Pouvez-vous partager une expérience spécifique lors d’un contrôle antidopage qui a eu un impact sur votre vie ?

Juste avant les Jeux Olympiques d’hiver de 2022, j’ai reçu un avertissement pour avoir oublié de mettre à jour mon planning sur l’application après un changement de météo qui a entraîné un décalage de deux heures dans notre séance d’entraînement. Lors d’un contrôle effectué à mon domicile, j’étais absente, ce qui a entrainé cet avertissement. Cette situation ajoute considérablement du stress, surtout à l’approche des JO où les contrôles sont plus fréquents.

Il est parfois difficile de penser immédiatement à mettre à jour son planning sur ADAMS lorsque des modifications surviennent dans notre emploi du temps, mais cela fait partie intégrante de la vie d’un athlète de haut niveau.

Sur une année, trois avertissements sont tolérés, mais au-delà, une interdiction de participer à des compétitions pendant trois ans est imposée. Cela souligne l’importance de rester vigilant et de maintenir constamment à jour les informations sur l’application.

En ce qui me concerne, cela fait désormais cinq ans que je fais partie du groupe de sportifs de haut niveau qui sont suivis sur ADAMS, et cette expérience met en lumière les défis persistants auxquels les athlètes de haut niveau sont confrontés vis-à-vis du respect des procédures antidopage.

Prévention contre le dopage :

Avez-vous déjà expérimenté des actions de prévention contre le dopage (formations) ?

Non, je n’ai été informée que lorsque j’ai intégré le système ADAMS, mais il existe énormément d’outils pour le faire de manière autonome. Les médecins du sport qui nous suivent via les visites obligatoires ont aussi un rôle important dans la prévention contre le dopage auprès des athlètes de haut niveau.

Est-ce que ces actions ont influencé votre compréhension des enjeux qui sont liés au dopage ?

Non car j’ai grandi avec la conviction que la triche n’a pas sa place dans le monde du sport, et que le dopage porte gravement atteinte à la santé.

Cette vision du sport m’a été inculquée dès mon plus jeune âge par tous les acteurs du sport qui ont encadré mon parcours, depuis mon enfance jusqu’à aujourd’hui. L’importance de l’intégrité sportive et les conséquences néfastes du dopage sur la santé ont toujours été des principes fondamentaux qui ont guidé ma pratique sportive.

Si vous aviez le pouvoir de changer quelque chose dans le « système » antidopage, que changeriez-vous et pourquoi ?

Bien que j’ai eu la chance de recevoir une éducation avec de solides valeurs antidopage, je suis consciente que tout le monde n’a pas nécessairement cette chance. Par conséquent, je pense qu’instaurer davantage de programmes de sensibilisation dès le plus jeune âge serait une bonne chose. Bien que des initiatives existent sans doute déjà, il reste toujours possible de les améliorer.

En ce qui concerne ADAMS, j’apprécierai plus une option de géolocalisation permanente afin de ne pas avoir constamment à m’en soucier. Il serait également bien que les contrôles aient lieu à des heures spécifiques de la journée, plutôt que de manière aléatoire, pour faciliter la planification de nos emplois du temps.